Actualités F.F.SQUASH

Squash, un sport, une passion

Actus

MARIE STÉPHAN : « MES MEILLEURES ANNÉES SONT DEVANT MOI ! »

Équipe de france 18/08/2025

Alors que les Jeux Mondiaux se sont achevés dimanche, on revient sur les performances des Bleu(e)s du squash avec des interviews des deux médaillés.

Après Victor Crouin, au tour de Marie Stéphan : la médaillée d'argent a vécu une semaine fondatrice en Chine, et aborde les championnats d'Europe individuels - qui démarrent mercredi à Chartres - en pleine confiance.

Propos recueillis par Jérôme Elhaïk

Marie, j’imagine que le voyage retour depuis la Chine a été long, est-ce que ça t’a laissé le temps de réaliser ce que tu avais fait ?

Ça a duré 27 heures en tout, avec de multiples escales, et dans ma tête je n’ai pas encore atterri (rires). Je ne réalise pas vraiment, même si on a pu fêter un peu ma médaille avec le staff, notamment du CNOSF.

Est-ce que c’est un regret d’avoir dû partir avant la cérémonie de clôture ?

Pas vraiment, on n’avait pas le choix avec la proximité des championnats d’Europe individuels. On a participé à la cérémonie d’ouverture, qui a été un grand moment, et ensuite j’ai vécu beaucoup d’émotions pendant le tournoi.

Vu de loin, on a eu l’impression que l’organisation de ces Jeux Mondiaux était exceptionnelle.

J’en parlais avec Léa Barbeau, on a eu la chance de vivre une expérience incroyable. Je n’étais pas à Birmingham il y a trois ans, ça avait l’air super, mais clairement la Chine a voulu mettre la barre très haut, notamment avec les quatre courts vitrés. Ça avait commencé à l’aéroport, où ils nous ont fait passer avant tout le monde. Quant aux installations, on n’avait pas d’attentes et on a été choqué. Chengdu, peut-être que le nom ne parle pas trop en France mais c’est une ville de 25 millions d’habitants.

« L'organisation de ces Jeux Mondiaux était tout simplement grandiose. »

Est-ce que tu as eu le temps d’aller voir d’autres disciplines ?

Pas du tout, pour deux raisons. Tout d’abord, on n’a eu aucun "day off," et ensuite les différents sites étaient très éloignés les uns des autres. Nous, on avait la chance que notre hôtel soit très proche du complexe où les épreuves de squash avaient lieu, mais ce n’était pas le cas de tout le monde. On avait un groupe Whatsapp regroupant l’ensemble de la délégation tricolore, où étaient annoncées toutes les médailles, et c’est une grande fierté de contribuer à la réussite de la France. On a fait connaissance avec les athlètes de l’Ultimate pendant la cérémonie d’ouverture et ils sont venus nous encourager, c’était très sympa.

Interview Marie Stéphan photo 1

Avec ses copines de l'équipe de France Kara Lincou et Léa Barbeau, Marie Stéphan a vécu une semaine pleine d'émotions à Chengdu (Crédit photo : Léa Barbeau)

Qu’est-ce qui t’a incité à participer aux Jeux Mondiaux ?

Je crois que la politique de la Fédération était de sélectionner une joueuse expérimentée, et une autre plus jeune. J’imagine que Mélissa Alves a décliné l'invitation car ça ne correspondait pas à son planification, et en tant que numéro 2 française j’étais la suivante sur la liste. J’ai un peu hésité car ça arrive très tôt dans la saison, mais comme mon club n’était pas qualifié pour les playoffs j’ai pu couper début juin. Ensuite, pendant sept semaines j’ai énormément travaillé physiquement (comme jamais dans ma carrière), avec l’entraîneur national Yann Menegaux et l’un des préparateurs physiques du CREPS d’Aix-en-Provence, Simon Duchene. Vélo, musculation, natation, etc. on a tout fait (rires) ! On ne sait jamais comment ça va se traduire en compétition, et justement les Jeux Mondiaux était l’opportunité de lancer la saison avec moins de pression que sur un tournoi PSA. Quand on voit le résultat, je ne regrette évidemment pas mon choix.

Tu as gagné tes trois premiers tours de manière expéditive, ça t’a mis sur les bons rails.

C’est surtout le match contre Karina Tyma qui m’a mise en confiance. C’est une joueuse qui a été championne d’Europe junior, récemment elle a eu des hauts et des bas mais est capable de très bien jouer, donc la battre 3-0 avec la manière c’était très positif.

Ta victoire en demi-finale contre Tomato Ho est peut-être la plus belle de ta carrière, et pourtant le match avait mal commencé (Marie a été menée 2-0 contre la n°29 mondiale).

Dans le deuxième jeu, je prends 11-1 et je ne faisais pas du tout ce qu’il fallait. Je me suis éloignée du court pour me calmer, Renan Lavigne est venu me voir et m’a dit que mon match commençait maintenant. Ça m’a reboosté, d’autant que je n’étais pas du tout entamée physiquement. Ensuite, j’ai suivi le plan de jeu, j’ai davantage utilisé les hauteurs et le fait que je ramène beaucoup de balles l’a frustrée.

« Je n'ai jamais autant travaillé physiquement que cet été. »

Les saisons précédentes, en particulier en 2024-2025, tu es passée plusieurs fois tout près de battre des joueuses mieux classées, et ça s’est concrétisé en Chine.

Effectivement, en 2025 j’ai perdu en 5 jeux contre Lucy Turmel et Katie Malliff, et je pense aussi à ma défaite en 4 jeux très accrochés contre Nour Aboulmakarim. Quand on arrive dans le money time de ces matches là, l’expérience est cruciale, ça aide de se dire qu’on l’a déjà fait et qu’on peut battre des joueuses qui ont ce classement. Donc oui, c’est un peu le travail des six derniers mois qui porte ses fruits, et c’est dans la continuité de ce que j’avais fait en fin de saison au British Open. Maintenant il n’y a pas de secret, pour monter au classement il faut que je sois plus constante et que je reproduise ce niveau de jeu sur la durée (NDLR : Marie est 49ème au classement de ce lundi).

Interview Marie Stéphan photo 2

Marie Stéphan (ici coachée par Renan Lavigne) a vécu une semaine fondatrice pour la suite de sa carrière en Chine (Crédit photo : World Games)

Un petit mot sur la finale contre Satomi Watanabe, tu as certes perdu en 3 jeux mais en montrant de belles choses.

C’est ce qu’on m’a dit, c’est marrant parce que je ne me rappelle pas du tout du match alors que je peux décrire chaque échange de la demie contre Tomato Ho ! En finale, j’étais épuisée mentalement et physiquement, et j’ai eu l’impression d’être un peu ailleurs. Satomi est évidemment une joueuse incroyable, dans ce genre de match le piège est de se dire que son tournoi est déjà réussi, et je pense que je n’y ai pas assez cru. Le truc, c’est que la demi-finale a été vraiment intense, il y a eu énormément d’émotions et de partage avec mes coéquipiers et le staff, et je n’ai pas beaucoup dormi la nuit suivante. Je ne suis pas habituée à tout ça, la plupart du temps, je joue dans l’anonymat, personne ne regarde mes matches à part ma famille et mon staff. J’ai même dit à Yann qu’à partir de maintenant je voulais jouer tout le temps sur un court vitré (rires), et en plus je crois que ça convient bien à mon jeu.

J’imagine que ces Jeux Mondiaux, ça donne envie de participer aux Jeux Olympiques en 2028 !

Sans aucun doute. On en saura bientôt plus sur les critères de sélection, et en ce qui me concerne j’ai prévu d’arrêter ma carrière après ceux de Brisbane en 2032 ! J’ai bon espoir que le squash y soit, et peut-être avec plus d’athlètes qu’à Los Angeles (NDLR : ce sera des tableaux de 16 en 2028). J’aurai 36 ans en Australie, et on a vu récemment grâce à Camille Serme que c’est possible de jouer à un très bon niveau à cet âge-là.

Tu parlais auparavant de travail physique, c’est un secteur dans lequel tu as clairement fait d’énormes progrès.

Même si on travaille tous les aspects de mon jeu, oui j’ai mis l’accent sur le physique, ainsi que la nutrition, avec Simon et Yann depuis que j’ai intégré le CREPS il y a un an. C’était ma grosse lacune : j’avais réussi à intégrer dans le top 50 en m’appuyant sur mes qualités naturelles, mais toutes les filles du top 10 et même 20 sont monstrueuses physiquement, ce n’est pas possible d’avoir des ambitions si on ne peut pas rivaliser avec elles sur ce plan.

Interview Marie Stéphan photo 3

Menée 2-0 contre Tomato Ho, Marie Stéphan a réalisé une incroyable remontée pour renverser la tête de série n°2 (Crédit photo : World Games)

Du coup, tu n’as pas de regrets de ne pas avoir fait ça plus tôt ?

Pas vraiment, et comme me dit souvent Yann ça ne sert à rien de ressasser le passé. J’ai perdu mon père en 2020, les trois années qui ont suivies ont été très difficiles et je n’étais pas focalisée sur ma carrière. Dans le parcours d’un athlète, la vie personnelle a forcément un impact. Aujourd’hui, j’ai 29 ans et je ne me suis jamais sentie aussi bien sur le court, je suis convaincue que mes meilleures années sont devant moi.

« Après le décès de mon père, j'ai vécu des années difficiles. »

En plus, comme tu as étudié aux États-Unis, tu as démarré sur le circuit PSA relativement tard et tu n’es pas usée.

En université américaine, même s'il y a la pression du résultat pour son équipe, c’est sûr que ce n’est pas comme en PSA où tu dois gagner des matches pour prendre des points mais aussi survivre financièrement. Je tiens à souligner que mes quatre années à Philadelphie ont été une expérience incroyable humainement, et j’ai obtenu un diplôme important pour mon avenir.

Tu ne vas pas avoir le temps de savourer longtemps cette médaille d’argent, car les championnats d’Europe individuels démarrent mercredi à Chartres.

Physiquement, quelques bonnes nuits de sommeil sont suffisantes pour récupérer. Mentalement, l’enchaînement ne sera pas facile mais je vais pouvoir surfer sur la vague de confiance. Comme en Chine, je serai tête de série 3/4 : j’avais dit que je visais le bronze et j’ai eu l’argent, j’espère que je vais faire la même chose. Ça va évidemment être compliqué avec les sœurs Gilis et Mélissa Alves, mais je vais donner le maximum. Même si je serai peut-être un peu attendue, je prends ça comme une bonne chose et c’est super que le tournoi ait lieu en France.

On entend parfois des critiques sur le niveau du squash féminin tricolore mais il a brillé cet été, avec la 5ème place de l’équipe de France au championnat du monde junior, puis ta médaille d’argent.

J’ai suivi de près le parcours des jeunes en Égypte, c’est vraiment dommage car elles sont passées tout près d’une médaile. Pour être honnête, oui il y a eu des hauts et des bas ces dernières années. Les retraites de Camille Serme et Coline Aumard ont été un coup d’arrêt, et l’écart entre Mélissa et les autres était assez important. L’un des points positifs, c’est l’éclosion de Lauren Baltayan, elle est une locomotive pour les autres juniors et elle nous pousse, nous les joueuses plus âgées. Je crois aussi qu’il y a un engouement depuis que Yann Menegaux a repris le groupe France. On est encore loin d’avoir la même densité que chez les garçons, mais on est sur la bonne voie.

Interview Marie Stéphan photo 4

Comme d'habitude, Marie Stéphan s'est faite remarquer avec des célébrations très expressives (Crédit photo : World Games)

Pour terminer sur une note plus légère, tes célébrations très expressives après tes victoires sont pas mal reprises sur les réseaux sociaux. Est-ce que tu as toujours fait ce genre de choses ?

Quand je les revois, ça me fait rire, c’est vraiment moi… C’était différent lorsque j'étais plus jeune car je gagnais plus souvent. Les joueuses qui ont mon classement gagnent très peu de matches sur les tournois majeurs, comme les Platinum. Il y a donc une certaine frustration qui s’accumule et mes célébrations sont un moyen de l’extérioriser.

Ce qui est étonnant, c’est que tu contiens toutes tes émotions pendant tes matches, et que tu lâches tout à la fin…

J’ai énormément travaillé dans ce domaine, par le passé ça m’est souvent arrivé de perdre à cause de mon énervement. Ces dernières années, Mostafa Asal s’est fait remarquer avec ses célébrations. C’est bien de voir des choses différentes, le squash en a besoin. Et dans les sports US, c’est la norme, après chaque dunk au basket ils célèbrent autant que moi quand je gagne un match ! Voir un athlète exprimer ses émotions, je trouve que c’est l'une des plus belles choses dans le sport.

Ces derniers mois, Melvil Scianimanico a également été tres vocal après certaines victoires, est-ce qu’il y a un concours entre vous deux ?

Pas vraiment, mais c’est vrai qu’il n’est pas mal non plus. J’espère qu’on aura tous les deux l’occasion d’en faire d’autres la semaine prochaine à Chartres…

CHAMPIONNATS D’EUROPE INDIVIDUELS, J-2

Après les médailles (or et argent) de Victor Crouin et Marie Stéphan aux Jeux Mondiaux, le squash tricolore a l’occasion de continuer son bel été la semaine prochaine à Chartres. Nous vous ferons évidemment vivre les championnats d’Europe individuels de près sur notre site et nos réseaux sociaux, en attendant vous pourrez retrouver toutes les infos sur notre mini-site consacré à la compétition :

Championnats d'Europe individuels 2025

Interview Marie Stéphan photo 5

Après sa médaille aux Jeux Mondiaux, Marie Stéphan (à gauche, en compagnie de Satomi Watanabe et Marta Dominguez) espère en accrocher une autre à Chartres en fin de semaine (Crédit photo : World Games)

< Retour