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CHAMPIONNAT DE FRANCE ÉLITE : ÇA S'EST PASSÉ À CHARTRES ...
Événements 08/02/2023En accueillant le championnat de France Élite, mais aussi les Interligues -13/-17 ans, le C'Chartres Squash et Badminton a vécu un beau moment de sport la semaine dernière.
Victor Crouin s'est imposé pour la première fois - et sans doute pas la dernière - alors que Marie Stéphan a conservé le titre acquis en 2022. Le tout devant des tribunes remplies du début à la fin du tournoi, et dans une très belle ambiance. Que faut-il retenir de cette édition 2022-2023 ? Décryptage en compagnie des principaux acteurs.
Article de Jérôme Elhaïk
Crédits photo FFSquash/Anthony Henriques
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AUJOURD'HUI ET DEMAIN
➡️ UNE BELLE RÉUSSITE. Pour la première fois depuis 2014, le championnat de France Élite (anciennement 1ère série) était de retour dans la partie Nord de l'hexagone, et cette édition a été unanimement saluée comme une grande réussite. « À partir du moment où l'on décide de ne pas installer de court vitré, il y a peu très peu d'installations de standing équivalent à celles de Chartres, » estime Julien Muller, président de la FFSquash. « De plus, même si c'était la première fois qu'ils accueillaient cette épreuve, ils ont l'habitude d'organiser des championnats de France. » « Après la crise sanitaire, on avait besoin de ça pour se relancer mais aussi pour se projeter dans l'avenir, » témoigne le directeur technique du club Denis Bourret, alors que l'association a connu un changement de présidence en 2021 (Maxime Sedilot a succédé à Olivier Roger de Campagnolle). « C'était un peu un pari pour nous, et il a été gagnant. On est très satisfait de l'affluence, notamment avec la venue des établissements scolaires le mercredi. Il y a également pas mal de pratiquants qui ont découvert le squash de haut niveau, ça peut leur donner envie de s'investir encore plus. » « Nous avons eu d'excellents retours des joueurs sur la qualité de l'organisation, ils ne le diraient pas s'ils ne le pensaient pas, » sourit Julien Muller. « Avec la hausse de la dotation depuis deux ans, un streaming de qualité etc., on peut dire que l'évènement se professionalise et monte en gamme d'année en année. »
« Ce genre d'évènement, c'est à la fois beaucoup d'investissement et un coup de boost pour le club »
Le président de la FFSquash Julien Muller (en bleu), entouré de Maxime Sedilot, président de l'association hôte et Denis Bourret, directeur technique du club
➡️ HORIZON 2025. Après trois éditions à Montpellier et trois autres à Bordeaux, le championnat de France Élite effectuera-t-il un mandat de la même durée à Chartres ? « Rien n'est encore acté, et d'autres clubs peuvent être intéressés, mais oui on pourrait être de retour ici l'année prochaine, » glisse Julien Muller. « On souhaite absolument continuer à avoir une compétition jeunes en même temps (voir ci-dessous ÉLITE INSIDE), et du coup ça limite forcément le nombre de structures d'accueil possibles. » De son côté, Denis Bourret serait également prêt à renouveler l'expérience. « Ce genre d'évènement, c'est un bon coup de pied aux fesses (sic) ! C'est à la fois usant car ça représente énormément de travail tout en étant un coup de boost pour l'ensemble du club. De plus, il y a une vraie dynamique sportive à Chartres ; notamment avec la locomotive que représente l'équipe masculine de handball. » La présence de Franck Masselus, adjoint aux finances, lors de la remise des prix, témoigne que la municipalité suit de près les projets du C'Chartres Squash et Badminton. Un élément à prendre en compte lorsqu'on évoque les deux mots magiques dans la discipline : court vitré. « C'est sans doute un peu tôt pour l'année prochaine, mais à l'horizon 2025 on aimerait utiliser celui dont nous disposons. Comme je l'avais dit après le championnat du monde junior l'été dernier à Nancy, cette expérience nous a permis de comprendre beaucoup de choses et on sait aussi qu'il existe des subventions pour ce genre de manifestations. Mettre un court vitré en centre ville, ici ou ailleurs, c'est un véritable relais et ça permet de toucher un public encore plus large. Au-delà du championnat de France Élite, nous avons été sollicités par l'European Squash Federation pour recevoir une compétition continentale à moyen terme, et dans ce cadre Chartres pourrait être une destination possible. » Wait and see ...
Tous les soirs, le public a pu refaire le match autour du bar du C'Chartres Squash et Badminton.
VICTOR CROUIN, PREMIÈRE
➡️ VICTOR TROP FORT. Avec la sincérité dont il est coutumier, Baptiste Masotti avait donné rendez-vous à Victor Crouin après sa demi-finale brillamment remportée face à Auguste Dussourd. Le Toulonnais a répondu présent, malgré la perte d'un premier jeu autant due à un peu de nervosité de sa part qu'à l'excellente entame de son adversaire. Petit à petit, le numéro 10 mondial va tisser sa toile, prenant le contrôle des opérations à partir du milieu de la deuxième manche. Alors que son adversaire avait retrouvé un second souffle, le tournant du match va intervenir avec un point fantastique à 4-4, remporté par Victor alors que Baptiste avait placé 4 ou 5 attaques quasi-irrattrapables … « Je me suis dit que j'avais la caisse pour aller chercher toutes ces balles et enchaîner sur le point suivant, C'est pour ça qu'on s'entraîne tous les jours, » disait-il avec le sourire après le match. « Les frappes courtes de Baptiste sont exceptionnelles, et l'un de mes principaux objectifs était d'être suffisamment relâché pour être en mesure de voir la balle partir et de pouvoir le contrer. Tous les plus grands joueurs français ont remporté cette épreuve, c'est un honneur pour moi de les rejoindre et je suis fier du travail qu'on a réalisé avec mon père pour y parvenir. » Avec ce premier titre de champion de France individuel en senior, Victor Crouin inscrit une ligne de plus à son palmarès, alors que sa saison 2022-2023 est (très) loin d'être terminée. Il sera tête de série n°1 de deux tournois Bronze en février, au Canada et aux États-Unis. En cas de bon résultat, les points marqués pourraient lui permettre de se rapprocher du top 8, un palier crucial pour être protégé dans les "majeurs".
« Tous les plus grands joueurs français ont été champions de France Élite, c'est un honneur de les rejoindre »
Victor Crouin (au premier plan) et Baptiste Masotti ont offert une finale de haut niveau au public chartrain
➡️ L'ŒIL DU COACH. « C'est un beau podium, » tels furent les premiers mots de Renan Lavigne, environ une heure après la finale lorsqu'on demandait à l'entraîneur national de faire un premier bilan de cette édition dans le tableau masculin. « Si l'on ajoute la demi entre Auguste et Baptiste, on a assisté à deux matches de haut niveau. Concernant Victor, il a vraiment été très solide en finale. Ses trajectoires de balle font en permanence mal à l'adversaire, l'impact au niveau cognitif est conséquent et Baptiste en a payé le prix. Ça lui montre le chemin à parcourir pour battre un membre du top 10 mondial, néanmoins j'ai trouvé qu'il avait été irréprochable dans la combativité et dans l'attitude. J'en profite pour souligner l'excellent comportement de tous les joueurs, ainsi que le travail des arbitres qu'il faut féliciter. Dans l'ensemble, la quasi-totalité des participants ont répondu présents, même si certains ont marqué plus de points que d'autres. Je pense à Macéo Lévy, dont le jeu s'est étoffé. Il n'a pas démérité en quart contre Victor, et aurait pu inquiéter encore davantage Benjamin Aubert dans le match pour la 5ème place. Le retour de ce dernier est une autre bonne nouvelle, il a pris du plaisir sur le court. Maintenant, il devra repasser par les petits tournois s'il veut remonter au classement PSA. On constate qu'il y a une belle émulation, chez les jeunes comme chez les moins jeunes. S'il y a parfois quelques frictions, c'est non seulement parce que le squash est un sport de contact mais aussi car il y a à la fois des joueurs qui doivent défendre leur position, et d'autres qui veulent monter dans la hiérarchie. » Interrogé sur le calendrier surchargé au cours des prochains mois pour les joueurs du top 50, Renan Lavigne préfère voir le bon côté des choses. « Certes, il faut évidemment faire des choix en termes de programmation. Cependant, il y a des sports dans lesquels les athlètes s'entraînent pendant des mois en vue d'une échéance lointaine, nous on a la chance de pouvoir enchaîner et de rebondir rapidement après une défaite. »
Le jeune Macéo Lévy (ici face à Baptiste Bouin) a fait très belle impression en Eure-et-Loir
MARIE STÉPHAN CONSERVE SON TITRE
➡️ STÉPHAN TOUT EN MAÎTRISE. À un an d'intervalle, la même explosion de joie pour Marie Stéphan, qui a conservé son titre de championne de France Élite à Chartres. Les deux histoires sont pourtant bien différentes : en 2022, elle avait de son propre aveu profité de la blessure de Mélissa Alves en demi, avant de redresser une situation compromise en finale contre Énora Villard. C'est sans perdre une seule manche que la Guyanaise a obtenu ce deuxième sacre, même si Énora a eu une opportunité d'égaliser à 1-1. « J'ai bien démarré, alors qu'elle a fait quelques fautes qui m'ont bien aidé, et ensuite ça s'est resserré, » disait Marie après sa victoire. « Sur ce tournoi, je trouve que j'ai élevé mon niveau de jeu par rapport à ce que je produisais ces derniers mois, et c'est le résultat du travail quotidien – notamment avec mon entraîneur Philippe Signoret, qui croit parfois plus en moi que je n'y crois moi-même … J'espère continuer sur cette lancée sur le circuit international, en gagnant des matches dans les Platinum et en remportant des tournois Challenger. » Pourquoi pas dès la semaine prochaine ? Marie Stéphan, ainsi qu'Énora Villard, seront au Canada pour y disputer un 12 000 $.
La joie de Marie Stéphan, championne de France Élite pour la deuxième année consécutive
➡️ UN FINAL DE QUALITÉ. « Oui, la finale a été d'un bon niveau, notamment technique, entre deux filles dont le niveau se situe autour de la 40ème place mondiale, » affirme Philippe Signoret. « Contrairement à l'année dernière, l'aspect mental n'a pas été déterminant. Je n'ai pas encore débriefé avec elle (NDLR : cet entretien a été réalisé lundi), mais je pense qu'Énora a été surprise par ce que Marie lui a proposé sur le plan tactique. En réalité, ça correspond à ce qu'on travaille depuis des mois : avoir un jeu plus étoffé, avec de la variété. Dans cette finale, elle a joué beaucoup de balles à l'avant du court et a volleyé plus que d'habitude. » Lorsqu'on lui suggère que la stagnation des deux finalistes dans la hiérarchie mondiale ne reflète pas leurs progrès dans le jeu, l'entraîneur national opine du chef. « Encore dernièrement au ToC, elles ont réalisé une belle prestation face à deux joueuses du top 25, Emily Whitlock et Alexandra Fuller, néanmoins il leur manque encore de petites choses pour gagner ce type de match. »
« Il ne manque que quelques petites choses à Marie et Énora pour battre des filles du top 30 »
➡️ BALTAYAN, PHÉNOMÈNE DE PRÉCOCITÉ. « J'ai trouvé que le match pour la troisième place avait été de bonne qualité mais derrière le niveau stagne, notamment celui des jeunes, » affirme Philippe Signoret. Alors que l'absence de Ninon Lemarchand, Ella Galova et Kara Lincou permet sans doute de nuancer un peu ce constat, Lauren Baltayan est un cas à part : à 15 ans et 9 mois, la Franco-Égyptienne est devenue la plus jeune joueuse de l'histoire de l'épreuve à monter sur le podium devant une certaine Camille Serme (cette dernière avait un mois de plus lorsqu'elle a décroché le bronze en 2005 à Rennes), qui l'a coachée en Eure-et-Loir. « Pourtant, elle s'était entraînée à Créteil les jours précédents et j'avais vu les mêmes choses qu'on m'avait rapportées suite au British Junior Open, en premier lieu une tendance à s'énerver devant l'adversité. Dans la préparation, on avait beaucoup insisté sur le fait qu'elle n'avait rien à perdre, et qu'elle devait jouer sans pression. Du stress, il y en a forcément eu un peu en fin de partie au premier tour contre Ambre Allinckx, et dans le match pour le bronze qui s'est joué en cinq jeux face à Élise Romba, mais elle l'a plutôt bien géré. » Même si elle n'a rien pu faire en demi face à Marie Stéphan, Lauren a donc obtenu deux victoires références face à des joueuses du top 100 mondial, et c'est de bon augure avant ses grands débuts sur le circuit international : dans quelques semaines, elle affrontera une fille du top 20 au premier tour du Black Ball Open, dans son club. « Les points marqués vont lui permettre de monter au classement (NDLR : aux alentours de la 150ème place) et d'intégrer rapidement les tableaux des petits tournois, c'est une très bonne chose. Tout en ayant une grosse marge de progression sur les aspects techniques et tactique, Lauren possède plusieurs ingrédients essentiels dans le squash moderne, en premier lieu la vitesse et une combativité hors normes. »
Même si on connaissait déjà son potentiel, Lauren Baltayan a été la révélation de la semaine
ÉLITE INSIDE
➡️ LA TRANSMISSION AU CŒUR DU JEU. Après le succès rencontré en 2022, l'organisation d'une compétition jeunes en même temps que le championnat de France Élite (en l'occurrence les Interligues -13/-17 ans) a logiquement été reconduite à Chartres. Des posters avaient été mis à disposition des enfants pour recueillir des autographes, et des temps d'échange prévus avec les athlètes. « Ils ont totalement joué le jeu, » disaient en cœur Denis Bourret et Julien Muller à propos de ces derniers, dont certains étaient également parrain ou marraine d'une équipe. Et lorsqu'on leur fait remarquer que les jeunes n'ont pas forcément regardé beaucoup de matches des 'Élite', le président de la FFSquash rétorque « que les enfants ne consomment pas le sport, et le squash, de la même manière que nous. Peut-être qu'ils ne sont pas toujours devant les courts, mais ils s'imprègnent de beaucoup de choses et s'inspirent des joueurs de haut niveau. Je peux vous le dire car mon fils m'en parle en permanence ! »
Les participants au championnat de France Élite (ici Baptiste Bouin, Maud Duplomb et Ambre Allinckx) ont pris le temps d'échanger avec les jeunes présents
➡️ FAITES DU BRUIT ! Dans notre compte-rendu de l'année dernière, nous avions souligné le bonheur de voir à nouveau des gradins remplis après une édition 2020-2021 à huis clos, crise sanitaire oblige. L'affluence a encore franchi un palier à Chartres, dont la tribune (300 places) est d'une taille sans équivalent dans le squash français. Dès le mercredi, les enfants – ceux de l'école de squash et des établissements scolaires locaux – l'avaient pris d'assaut et mis une belle ambiance, alors qu'elle était quasi-pleine vendredi soir et samedi après-midi, à l'occasion des demi-finales et des finales. Il faut néanmoins rendre à César ce qui est à César : en termes de décibels, le niveau maximum a été atteint dimanche lors de la rencontre entre l'Île-de-France et la Corse disputée sur un court annexe, décisive pour l'obtention de la médaille d'argent au championnat de France Interligues -13 ans …
La tribune du C'Chartres Squash et Badminton a été bien remplie pendant cinq jours
➡️ DE L'AUTRE CÔTÉ DU MIROIR. La présence de Camille Serme aux côté de Philippe Signoret pour encadrer les représentantes de l'US Créteil au championnat de France Élite fût l'une des attractions de cette semaine chartraine. Une première réussie, puisque la recordwoman du nombre de titres dans l'épreuve (12) a contribué à prolonger l'hégémonie du club val-de-marnais qui dure depuis 2009 chez les femmes … « Elle est désormais salariée de l'association, et ça fait partie de ses missions, » précise l'entraîneur national. « Si elle n'avait pas déjà d'autres engagements, elle se serait d'ailleurs rendue à l'open de France junior (NDLR : 16-19 février à Lille). Il y a des gens qui pensaient que devenir entraîneur ne faisait pas partie de ses plans, mais la vérité est qu'auparavant elle était totalement focalisée sur sa carrière de joueuse. Maintenant qu'elle a mis un pied dedans, l'appétit vient en mangeant … Elle a vraiment envie de s'investir, et elle a démarré le processus pour obtenir le DEJEPS. » C'est évidemment une très bonne nouvelle, alors que les deux autres légendes du squash tricolore – Thierry Lincou et Grégory Gaultier – exercent leurs talents d'entraîneur hors des frontières de l'hexagone, pour des raisons différentes « et bien compréhensibles, » souligne Philippe Signoret. « De son côté, Camille a beaucoup voyagé dans sa carrière et a envie de se poser. » Lorsqu'on l'interroge sur la méthode de sa protégée, il évoque « les réalités technico-tactiques auxquelles chaque entraîneur est confronté, cependant on ressent déjà un style qui correspond à sa personnalité. Elle est très proche des athlètes, et les encourage en permanence à rester positives. »
Pour Philippe Signoret, la proximité avec les athlètes est l'une des marques de fabrique de la jeune coach Camille Serme
Merci à toutes celles et ceux (partenaires publics et privés, structure d'accueil, bénévoles, prestataires, membres de l'équipe fédérale, entraîneurs/staff, arbitres, spectateurs/téléspectateurs et évidemment les athlètes) qui ont contribué à la réussite de ce championnat de France Élite 2022-2023. À l'année prochaine !