Étant donné les circonstances (seulement trois mois de préparation), il a été une grande réussite. Avec quelques jours de recul, on revient sur l'évènement à travers les témoignages de quelques acteurs majeurs.

Article de Jérôme Elhaïk

Crédits photo FFSquash/World Squash Federation

Nancéen de cœur, et directeur de l'un des deux sites de la compétition (le TSB Jarville) depuis 1999, Julien Muller a joué un rôle essentiel dans l'organisation du championnat du monde junior. Le président de la Fédération Française de Squash savoure la réussite de l'évènement, tout en se projetant vers l'avenir.

JULIEN MULLER (PRÉSIDENT DE LA FFSQUASH) 🎤

« C'était un gros défi d'organiser cet événement en seulement trois mois, et on l'a fait (NDLR : il était initialement prévu en Russie) ! Tout le monde a travaillé sans relâche – la WSF, qui nous a fait confiance, les équipes de la Fédération, les bénévoles, les prestataires, les partenaires publics et privés, etc. - et les retours des délégations m'amènent à penser que c'était un succès.

Concernant la compétition, il y a plusieurs choses qui me viennent à l'esprit. La performance de Rowan Damming en finale, il a fait preuve d'une grande maturité, les deux remontadas incroyables d'Amina Orfi ainsi que le match de Finlay Whitington en finale de l'épreuve par équipe. Dans l'ensemble, je trouve que les joueurs les plus performants ont aussi été les plus créatifs, c'est la tendance dans le squash moderne. C'est également intéressant de voir l'Europe de retour au premier plan chez les garçons, après une période d'énorme domination de l'Égypte. Pour ce qui est de la France, nous sommes satisfaits d'avoir atteint les quarts dans les épreuves individuelles garçons et par équipe. Même si ça a été plus compliqué pour les filles qui avaient des tirages difficiles, ce sera de toute façon une expérience précieuse pour tous nos jeunes athlètes. Il faut également parler des arbitres, on avait six Français alors qu'on entend parfois qu'on n'est pas suffisamment présents au plus haut niveau.

À l'image de ses présidents respectifs, Julien Muller et Zena Wooldridge, la FFSquash et la WSF ont travaillé main dans la main pour que le championnat du monde junior soit une réussite

Nous sommes très satisfaits de la couverture médiatique, ainsi que de l'affluence, même si elle a été variable pour des raisons évidentes – les vacances, ainsi que la durée de l'événement. La qualité des images télé a été unanimement saluée, et des gens ont pu regarder les matches dans le monde entier. Les collectivités locales ont été impressionnées par la qualité de l'organisation : plusieurs élus sont venus, et j'ai reçu de nombreux messages d'autres qui n'ont pas pu faire le déplacement. Mon seul regret, c'est de ne pas avoir été en mesure de mettre en place davantage d'animations pour les jeunes autour de l'évènement, on l'aurait évidemment fait si on avait eu davantage de temps de préparation.

En conclusion, je dirais que ce championnat nous a permis, moi y compris, de comprendre pas mal de choses – par exemple l'installation et le démontage d'un court vitré. Je suis convaincu que ça va nous ouvrir plein de portes pour réaliser de grandes choses dans le futur, même si ce ne sera pas forcément à Nancy ni la même compétition. Notre objectif, c'est de créer un package que les clubs de France pourront utiliser pour organiser des manifestations de ce type, car elles sont essentielles pour promouvoir le squash auprès du grand public. »

ZENA WOOLDRIDGE (PRÉSIDENTE DE LA WORLD SQUASH FEDERATION) 🎤

« Après une très longue attente, les joueurs et joueuses avaient une grosse envie de jouer et ont pris énormément de plaisir. Ils nous ont offert un spectacle fantastique pendant deux semaines, et je félicite tout particulièrement les médaillés. Nous avons eu la chance d'avoir 23 nations dans l'épreuve par équipe garçons, ça montre l'importance de ce championnat. Je souhaiterais exprimer ma gratitude envers la Fédération Française de Squash et son président Julien Muller. Ils ont accepté ce challenge dans un délai très court, et ont travaillé très dur pour organiser cette compétition. Je voudrais également remercier les deux clubs, le Squash du Rêve et le TSB Jarville, qui nous ont très bien accueillis, Thomas Forster et son équipe d'arbitres, le directeur technique de la WSF, Jim Hay, et toutes celles et ceux qui ont contribué à la réussite de cet événement. Je pense par exemple aux personnes dans les coulisses, comme celles qui se sont occupées de la communication et de la diffusion des matches et évidemment des bénévoles. Leur rôle est essentiel, et sans eux ce genre de manifestations ne peut pas exister. »

Lors de la remise des prix, Zena Wooldridge a tenu à remercier tout particulièrement Christopher Votion, directeur du tournoi. « On m'a dit qu'il avait travaillé 16 heures par jour depuis quelques semaines, et qu'il n'avait pas beaucoup dormi ... » souriait la présidente de la WSF. Comme à son habitude, le Belge de 34 ans aux multiples casquettes n'a pas ménagé ses efforts pour que tout se déroule du mieux possible.

CHRISTOPHER VOTION (DIRECTEUR DU TOURNOI) 🎤

« Je me souviens comme si c'était hier du jour où Julien Muller m'a appelé. J'étais à Aix-en-Provence pour une session de formation du DEJEPS, et il m'a simplement dit, 'tu serais partant pour qu'on organise le championnat du monde junior ?'. Sans réfléchir très longtemps, je lui ai dit banco … À aucun moment je n'ai regretté d'avoir accepté ce challenge, et le sentiment qui m'habite à l'instant présent est l'apaisement. La mise en place de cette compétition a représenté beaucoup de travail et de pression. Si on avait eu plus du temps pour la préparer on aurait pu répartir les rôles de chacun de manière plus précise, néanmoins on s'est adapté. Heureusement qu'on a réussi à dégager quelques moments pour décompresser un peu – en ce qui me concerne, le match exhibition avec Romain Bouger sur le court vitré (rires) ou la soirée improvisée avec les bénévoles au Squash du Rêve – c'est indispensable de sortir la tête du guidon pour ne pas exploser. Ce genre d'évènements permet de fédérer une équipe, mais aussi d'insuffler une énergie nouvelle. Pour preuve, ça a donné envie de reprendre à des gens qui avaient arrêté le squash depuis quelques années. Même s'il y a eu quelques frictions, ce qui est normal, je retiens également les superbes rencontres avec certaines délégations (par exemple la Guyane, la Corée ou Hong Kong), qui sont pour moi l'essence du sport. Il faut aussi souligner que ça a été une vraie réussite sur le plan sanitaire, organiser une compétition avec autant de participants n'est pas facile en ce moment et je pense qu'on a su bien les protéger.

Même s'il est de nationalité Belge, Christopher Votion (troisième en partant de la gauche) a été le véritable couteau Suisse du championnat du monde junior ...

En ce qui me concerne, ce n'est pas encore le moment de prendre des vacances car il y a une nouvelle saison sportive qui démarre bientôt. Au Squash du Rêve, on aura deux équipes en Nationale 1, un tournoi PSA hommes et femmes début octobre, mais la priorité est de développer les écoles de jeunes et j'espère que ce championnat du monde junior va créer une dynamique. »

Thomas Souverain faisait partie des nombreux élus présents lors de la cérémonie d'ouverture place Stanislas, et le conseiller délégué aux grandes manifestations de la ville de Nancy a également assisté à plusieurs matches au TSB Jarville.

THOMAS SOUVERAIN (ADJOINT AU MAIRE DE NANCY) 🎤

« J'ai pris beaucoup de plaisir à assister aux matches. On a senti ces jeunes joueurs un peu nerveux, signe de l'enjeu de cette compétition pour eux. Même si je viens du tennis, j'ai déjà pratiqué le squash quelques fois avec un ami, au club du Well & Fit à Laxou. Avec deux autres clubs, le Rêve à Maxéville et le TSB Jarville, ce sport est très dynamique dans la métropole mais il n'y a pas de courts à Nancy, c'est sans doute un sujet sur lequel il faut se pencher. La France accueillait le championnat du monde junior pour la première fois, nous avons été ravis d'apporter notre contribution sachant que le fait que Julien Muller soit Nancéen a facilité certaines choses. Je sais qu'il a pas mal d'idées pour le futur, et les collectivités sont prêtes à le suivre : Nancy est une ville qui aime le sport, et les grands évènements. Pourquoi ne pas envisager d'installer un court vitré place Stanislas – l'une des plus belles au monde, classée au patrimoine de l'UNESCO et que les délégations ont pu admirer lors de la cérémonie d'ouverture ? »

À l'image de Thomas Souverain, les collectivités locales sont prêtes à soutenir les instances du squash dans leurs futurs projets à Nancy

« Comme tout le monde, je vais avoir besoin de couper un peu, » souriait Yann Menegaux dimanche. L'entraîneur de l'équipe de France junior dresse un bilan de positif des 11 jours de compétition côté Tricolore, marqués par les duels acharnés entre son leader Brice Nicolas et les meilleurs jeunes joueurs de la planète.

YANN MENEGAUX (ENTRAÎNEUR DE L'ÉQUIPE DE FRANCE JUNIOR) 🎤

« Certes, il y a quelques petits regrets car chez les garçons, on était à un match du podium dans les deux épreuves. Avec deux quarts de finale, le bilan est néanmoins positif et ça a été une belle quinzaine. En individuel, le tableau était très homogène, il n'y avait pas de joueur au-dessus du lot et beaucoup pouvaient prétendre au titre. Brice Nicolas est tombé sur un Mohamed Zakaria très solide dans le cinquième jeu de son quart de finale, néanmoins ça n'efface pas son superbe match au tour précédent face à Noor Zaman et cette compétition a été un révélateur pour lui. Concernant l'épreuve par équipe, c'est dommage de terminer par deux défaites mais on ne se focalise pas là dessus : face aux Pays-Bas, Brice est passé a eu une balle de match face au champion du monde Rowan Damming – qui n'avait pas joué la veille face à l'Égypte, c'est vraiment étrange de ne pas aligner son numéro 1 en quart de finale d'un championnat du monde ... – alors qu'on n'a pas trop compris pourquoi les États-Unis ont aligné une équipe complète le dernier jour, après avoir joué à seulement deux joueurs le samedi. L'objectif était le top 8, il a été atteint même si avec le recul on se dit qu'il y avait la place pour passer face à la Malaisie en quart. On savait que Laszlo Godde ferait face à un adversaire très fort, alors que Brice a fait un super match contre Joachim Chuaha. Malheureusement, ce dernier a joué à un niveau bien plus élevé que ce que j'avais vu auparavant, en ne faisant quasiment aucune faute alors que Brice a un peu craqué dans le cinquième jeu. C'était le match clé, car vu le niveau de jeu affiché par le numéro 3 Malaisien le lendemain Melvil aurait sans doute gagné.

Côté Tricolore, Yann Menegaux (à droite) tire un bilan positif de ce championnat du monde junior

Au-delà des résultats, ces 11 jours de compétition ont constitué pour eux un bel apprentissage. On a effectué un premier débrief après la dernière rencontre, on sent que ça leur a donné envie d'aller plus loin. Ils se rendent compte qu'ils sont au contact des meilleurs, maintenant c'est le travail au quotidien qui leur permettra d'aller là où ils le souhaitent, et de les rejoindre voire de leur passer devant. Ils vont maintenant couper une bonne semaine avant de repartir à l'entraînement. Il y a une série de tournois PSA en France en novembre, ce serait bien qu'ils puissent obtenir des invitations car leur classement ne leur permet pas de rentrer dans les tableaux. En tous les cas, ils disent tous que ce championnat du monde junior leur a donné une grosse envie de se lancer complètement sur le circuit pro. »

☛ 230 athlètes (130 garçons, 90 filles), issus de 37 nations et des 5 continents, ont participé au championnat du monde junior. En 11 jours, les juges-arbitres et les 16 arbitres ont lancé 703 matches sur les 9 courts du Squash du Rêve et du TSB Jarville !

☛ L'Égypte est plus dominatrice que jamais chez les filles : 4 joueuses en demi-finale, ce qui s'était déjà produit en 2013, 2014 et 2015, et 14ème titre lors des 15 dernières éditions. Amina Orfi (15 ans) est la plus jeune championne du monde junior depuis Nour El Sherbini, qui avait 13 ans lors de son sacre en 2009. Orfi est également la première joueuse de l'histoire à remonter un handicap de deux jeux en finale.Toujours en matière de précocité, son compatriote Mohamed Zakaria (14 ans) était le plus jeune joueur dans le dernier carré depuis Aamir Atlas Khan en 2004, ainsi que le plus jeune de l'histoire en finale de l'épreuve par équipe.

Vainqueurs des tableaux individuels, Rowan Damming et Amina Orfi ont marqué l'histoire de l'épreuve

☛ Chez les garçons, le squash Européen est de retour au premier plan : dans l'épreuve par équipe, l'Angleterre a renoué avec le succès, après vingt-deux ans d'attente. La finale Rowan Damming - Finnlay Whitington était la première 100 % Vieux Continent depuis 2000, et le titre du Néerlandais a mis fin à six années de domination totale de l'Égypte sur la planète squash (27 titres mondiaux consécutifs).

☛ Le pays de Pharaons a tout de même obtenu la moitié des médailles en jeu à Nancy : 1 d'or, 2 d'argent et 3 de bronze. On retrouve ensuite l'Angleterre (1 d'or, 1 d'argent), le Pakistan (2 de bronze), les Pays-Bas (1 d'or) et la Malaisie (1 de bronze).

☛ Côté Tricolore, Brice Nicolas est devenu le septième garçon à atteindre les quarts de finale du championnat du monde junior individuel après Thierry Lincou, Grégory Gaultier, Grégoire Marche, Lucas Serme, Benjamin Aubert et Victor Crouin. Les Bleus ont également terminé dans le top 8 pour la septième fois dans l'épreuve par équipe.

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