Actus
RETOUR SUR LE CHAMPIONNAT DE FRANCE ÉLITE
Événements 08/03/2021Leur parcours n'a pas été un long fleuve tranquille, mais les patrons du squash hexagonal ont fait honneur à leur statut le weekend dernier, à l'occasion du championnat de France Élite.
Sérieusement bousculée par Mélissa Alves à l'entame de la finale, Camille Serme est parvenue à inverser la tendance pour décrocher un douzième titre historique. De son côté, Grégoire Marche a été impressionnant de maîtrise pour repousser les assauts de Victor Crouin, Lucas Serme puis Mathieu Castagnet hier. Retour sur cette belle édition 2020-2021.
Article de Jérôme Elhaïk
Revivez le championnat de France Élite 2020-2021 en images sur notre page Facebook (cliquez sur la photo ci-dessous)
CHAHUTÉE, CAMILLE SERME N'A PAS CHUTÉ
Ils n'étaient que 5 % à avoir voté pour une victoire de Mélissa Alves face à Camille Serme, sur le sondage lancé sur notre page Instagram avant la finale du tableau féminin. On s'est dit qu'ils allaient peut-être avoir raison, lorsque la Guyanaise a entamé les débats tambour battant, remportant 15 des 16 premiers points dont sept coups gagnants. « J'ai bien cru que j'allais devoir attendre un an de plus pour remporter ce douzième titre, » disait Camille Serme à notre micro après le match. « Mélissa m'a dominée en longueur, je n'arrivais pas à trouver de solution pour lui passer devant. C'est grâce à ma combativité que j'ai réussi à revenir dans la partie. Puis petit à petit j'ai gagné en précision, ce qui m'a permis d'avoir mes propres opportunités d'attaquer. » Menée 6-3 dans le deuxième manche, la numéro 3 mondiale a finalement égalisé à l'issue d'un tie-break conclu par deux fautes de son adversaire. Dans les deux jeux suivants, l'entame sera serrée mais le travail de sape de la favorite va finir par payer, et elle termine le travail par une volée haute de revers dont elle a le secret. Camille Serme peut être soulagée : cette victoire lui permet de marquer encore un peu plus l'histoire du squash français, en battant le record de titres nationaux qu'elle co-détenait avec Corinne Castets et Isabelle Stoehr. Quant à Mélissa Alves, elle a prouvé qu'elle se rapprochait de « (sa) rivale sur le court, mais amie au quotidien, » Pour le plus grand bonheur de leur entraîneur Philippe Signoret, ravie de cette saine émulation.
« C'est grâce à ma combativité que j'ai réussi à revenir dans le match »
Camille Serme (à droite) a subi la domination de Mélissa Alves en début de finale, avant de parvenir à inverser la tendance (Crédit photo : Pierre-André Loaëc)
➡️ En l'absence de Coline Aumard (en phase de reprise après une blessure au pied), Énora Villard a tenu son rang en décrochant le bronze pour la troisième fois en quatre éditions. On aurait bien aimé la voir se mesurer à Ambre Allinckx, mais la jeune Franco-Suisse a déclaré forfait dimanche. Mention également à Léa Barbeau : neuvième en 2020, la joueuse du Mulhouse Squash Club confirme sa progression avec une belle cinquième place, et notamment une superbe victoire face à Élise Romba 3 jeux à 0.
Pour la deuxième année consécutive, les Cristoliennes Mélissa Alves, Camille Serme et Énora Villard se sont retrouvées sur le podium (Crédit photo : US Créteil Squash)
➡️ LA STAT : Il faut remonter à février 2015 pour retrouver la trace d'un match où Camille Serme avait perdu le premier jeu face à une compatriote. C'était également en finale du championnat de France Élite, à Veigy-Foncenex, et elle s'était imposée 11-9 au cinquième jeu face à Coline Aumard. « Mélissa a déjà battu des joueuses du top 15 mondial, je savais qu'elle en était capable, » a répondu Camille lorsqu'on lui a demandé si avait été étonnée par le début de partie totalement à l'avantage de sa partenaire d'entraînement.
GRÉGOIRE MARCHE EN PATRON
Cela fera bientôt deux ans que Grégoire Marche est numéro 1 français. Ce statut a été en partie obtenu grâce à la blessure de Grégory Gaultier, mais aussi par l'installation du Drômois dans un top 16 mondial dont il n'est quasiment jamais sorti pendant cette période. Le patron du squash masculin hexagonal, c'est bien lui et il l'a prouvé le weekend dernier. Tout d'abord en repoussant les assauts de l'homme en forme du moment, Victor Crouin, qu'un tirage au sort en forme de cadeau empoisonné avait mis sur sa route en quart de finale. Signe d'une exigence toujours plus élevée, Marche s'estimait « insatisfait de (sa) constance, » après sa victoire face à Lucas Serme, dans une demi-finale qu'il avait largement dominé dans un premier temps avant de perdre sa concentration. Rien de tout cela en finale, face à Mathieu Castagnet : après le gain d'un premier jeu crucial, marqué par quelques échanges exceptionnels (voir La stat), il n'a laissé aucune chance à un adversaire en manque de compétition et marqué par les efforts de la veille. « Je suis très content d'avoir été solide tout le weekend, face à des joueurs du top 40 mondial, » disait le désormais triple champion de France à notre micro. « Le travail effectué à l'entraînement récemment porte ses fruits, et je repars avec de la confiance en vue du Black Ball Open. » Exempté de premier tour, il affrontera le Colombien Miguel Angel Rodriguez le 20 mars. Ce sera l'opportunité pour Grégoire de franchir la marche supplémentaire, à savoir battre un membre du top 10 mondial dans un tournoi majeur ...
« Je suis très content d'avoir été solide tout le weekend »
Après un énorme premier jeu, Grégoire Marche a pris la mesure de Mathieu Castagnet en finale (Crédit photo : Pierre-André Loaëc)
➡️ Pendant plus de 17 ans (de septembre 2001 à janvier 2019), la France a été présente sans interruption dans le top 10 mondial, grâce aux légendes que sont Thierry Lincou et Grégory Gaultier. Ce n'est plus le cas depuis, mais la densité du squash masculin Tricolore n'a jamais été aussi forte. On en a eu une nouvelle fois la preuve le weekend dernier à Bordeaux, malgré quelques absences (Grégory Gaultier justement, Benjamin Aubert, Auguste Dussourd et Sébastien Bonmalais). Que ce soit le quart de finale Marche - Crouin, les deux demi-finales (Marche - Serme et Castagnet - Masotti), le match pour la troisième place et même le début de la finale avant que Marche ne prenne le dessus, les affrontements de très haut niveau n'ont pas manqué en Gironde. De quoi satisfaire l'entraîneur national Renan Lavigne, et d'augurer de belles choses en vue du Black Ball Open (19-25 mars). Sept Bleus figurent dans le tableau, désormais une (bonne) habitude dans les tournois majeurs. Avec notamment un rendez-vous que tout le squash français attend, le choc des générations au premier tour entre Grégory Gaultier (38 ans) et Victor Crouin (21 ans).
Le tableau masculin nous a offert de superbes matches, à l'image de celui pour la médaille de bronze entre Baptiste Masotti et Lucas Serme - remporté par le premier cité en 5 jeux (Crédit photo : Pierre-André Loaëc)
➡️ LA STAT : 149, comme le nombre de frappes lors de l'échange à 3-3, dans le premier jeu de la finale masculine. Mathieu Castagnet a finalement envoyé la balle en dehors des limites du court, alors que Grégoire Marche venait de casser son cordage. Comme l'arbitre Nicolas Barbeau avait auparavant accordé plusieurs lets consécutifs, le score n'a pas bougé pendant plus de 5 minutes !
QUAND LA JEUNESSE SE FROTTE À L'ÉLITE
Depuis un an, le travail de Yann Menegaux a un peu changé : l'entraîneur national a perdu sa casquette de sélectionneur des équipes de France jeunes, covid-19 oblige. « Du coup, je me concentre davantage sur les joueurs dont je m'occupe au quotidien, même si ça ne m'empêche pas de suivre les autres, » indique le responsable du pôle espoirs d'Aix-en-Provence. Ce qu'il a fait pendant six jours au SquashBad33, où se sont tenus successivement les qualifications, puis le tableau principal du championnat de France Élite 2020-2021. Et il n'a pas chômé car les jeunes étaient présents en force (23 moins de -19 ans, sur les 48 engagés), confirmant la tendance observée la saison dernière. Sans oublier ceux qui viennent de dépasser la limite d'âge, comme Manuel Paquemar et Toufik Mekhalfi, respectivement septième et huitième du tableau masculin. « Ils continuent de progresser, à l'image de la belle prestation de Toufik en quart de finale face à Mathieu Castagnet, » confie Yann Menegaux. « Dans leur génération il y a aussi Paul Gonzalez, qui était malheureusement blessé et n'aurait sans doute pas participé s'il n'y avait pas aussi peu de tournois au calendrier. » Derrière eux, il évoque une « grosse densité actuelle » chez les 15-18 ans. « Ça n'a pas toujours été le cas, je pense par exemple à la génération de Baptiste Masotti et Auguste Dussourd. On a 8 ou 9 jeunes qui montrent de belles choses : les quatre qui s'étaient qualifiés (Brice Nicolas, Macéo Lévy, Baptiste Bouin, Laouenan Loaëc), et d'autres comme Laszlo Godde, Joshua Jacques Phinera etc. ainsi qu'Antonin Romieu et Melvil Scianimanico, plus jeunes mais qui tapent à la porte. On peut d'ailleurs faire un parallèle, avec à peu près dix ans d'écart, avec le groupe de joueurs français qui dispute actuellement les tournois majeurs en PSA, et se dire que le squash masculin français a de beaux jours devant lui. »
« Chez les garçons, il y a une grosse densité en jeunes à l'heure actuelle »
Lorsqu'on l'interroge sur l'absence de repères par rapport aux autres nations en cette période particulière, Yann Menegaux nuance. « Ce serait embêtant s'ils ne jouaient qu'entre eux, or depuis quelques mois ils se frottent aux meilleurs français, aguerris au circuit professionnel. Je trouve qu'ils progressent dans la capacité à tenir les échanges, et le rythme de leurs aînés. On peut également noter leur combativité du début à la fin d'un match, alors que par le passé on a pu voir des joueurs qui baissaient les bras lorsque ça n'allait pas. Il y a une saine émulation mais aussi de la solidarité et ils sont contents quand l'un d'entre eux réalise une perf. » Même si tous ont montré de belles choses ces derniers jours, Brice Nicolas mérite d'être mis en avant : en dix jours, le Néo-Calédonien a disputé dix matches (« Cet enchaînement était un peu extrême, il ne faut pas répéter ça trop souvent, » sourit Yann Menegaux), remportant le PSA Satellite de Cognac puis les qualifications, avant de terminer 10ème du championnat France Élite. Le tout à 17 ans, et pour sa première participation ...
Brice Nicolas (au premier plan, ici face à Baptiste Bouin en finale des qualifications) a marqué les esprits par ses performances lors de ces derniers jours (Crédit photo : Nicolas Barbeau)
Ce n'est pas un secret que la densité chez les jeunes filles est actuellement moins importante. « J'aurais bien aimé que Kara Lincou ou Lauren Baltayan soient là, » souligne Yann Menegaux. « Comme il y a moins de concurrence, elles sont un peu assises dans un fauteuil (sic) et contrairement aux garçons, elles n'ont pas la chance de côtoyer leurs aînées au quotidien (NDLR : le pôle France masculin est également basé à Aix-en-Provence, alors que les femmes sont à Créteil). Comme on disait avec Philippe Signoret, la seule solution pour progresser est de se confronter plus souvent à des joueuses plus âgées. » Le responsable du pôle espoirs évoque également pour ces jeunes filles, par exemple Mahé Asensi et Ninon Lemarchand (Ana Munos est un peu plus jeune), la difficulté de se trouver à un carrefour, avec la perspective du bac et des choix inhérents. « Une fille comme Léa Barbeau a passé ce cap et elle a beaucoup progressé. Son jeu n'a pas vraiment changé, mais elle est plus endurante et fait moins de fautes. C'est pour cela qu'elle a pris le dessus sur Mahé et Ninon, qui doivent étoffer leur jeu car de manière générale elles s'appuient encore trop sur le style que l'on observe en jeunes - par exemple vouloir marquer trop vite le point. Les garçons l'ont bien compris, ils n'ont pas le choix s'ils veulent exister contre les plus âgés ... » Parmi les plus jeunes, Yann Menegaux a noté la belle prestation de Rose-Lucas Marcuzzo, qui rentre dans le top 10 pour une première participation. « Elle a une belle main, maintenant il lui faut développer ses capacités physiques si elle veut tendre vers le haut niveau. J'ai également bien aimé Lilou Brévard-Belliot, que j'ai trouvé très mobile sur le court. On sent qu'elle a un entraîneur qui s'occupe bien d'elle (NDLR : son père Stéphane, responsable du centre d'entraînement régional de La Rochelle) ... »
Pour Yann Menegaux, Mahé Asensi (en rouge) et les autres jeunes filles doivent passer le cap des juniors vers les seniors, ce qu'a su faire Léa Barbeau (Crédit photo : Nicolas Barbeau)
L'ENVERS DU DÉCOR
Alors que le mouvement sportif national avance au ralenti depuis maintenant un an, la Fédération Française de Squash, ainsi que ses ligues, associations et structures affiliées (dont le SquashBad33, qui a accueilli le championnat de France Élite 2020-2021), œuvrent pour que les athlètes de haut niveau puissent continuer à exercer leur métier, et leur passion. Cette compétition avait bien évidemment lieu à huis clos, et dans des conditions sanitaires strictes. Vous avez pu néanmoins suivre tous les matches des tableaux principaux grâce à la société ScoreBad, en charge du streaming. Ses opérateurs faisaient partie des hommes (et femmes) de l'ombre, qui assurent le bon déroulement d'un tel évènement. Parmi eux, il y avait le juge-arbitre et les quatre arbitres fédéraux présents. Pour l'occasion, Pierre Bernard, Simon Saunders, Nicolas Barbeau, Bruno Jacob et Yann Bonguardo étaient habillés par Hummel, nouvel équipementier de la Fédération et des équipes de France depuis quelques semaines. Merci à notre nouveau partenaire.
Le juge-arbitre Pierre Bernard (au centre) et les arbitres fédéraux ont étrenné leurs nouvelles tenues le weekend dernier (Crédit photo : FFSquash)
Revivez la remise des prix (tous les matches sont à revoir sur la chaîne YouTube de la FFSquash)