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ANNECY ROSE OPEN 2019 : MILOU VAN DER HEIJDEN, DOUCEMENT MAIS SÛREMENT
Événements 22/03/2019Bousculée lors de la plupart de ses matches, notamment en finale par Coline Aumard, Milou van der Heijden a pourtant fait honneur à son statut de tête de série n°1 en remportant l'Annecy Rose Open 2019 dimanche dernier.
Après avoir récemment intégré le top 30 mondial, la Néerlandaise continue son ascension, sans faire de bruit. Nous sommes partis à la rencontre de cette joueuse de 28 ans, discrète et attachante.
Article de Jérôme Elhaïk
Version anglaise : THE STEADY RISE OF MILOU VAN DER HEIJDEN
SUR SA VICTOIRE À ANNECY, ET LE TOURNOI EN GÉNÉRAL
« Coline et moi sommes de la même génération et on s'est côtoyées en juniors, mais on s'était seulement affrontées deux fois sur le circuit auparavant (NDLR : la Française s'était imposée à chaque fois). Je trouve que ça a été une belle finale. Nous avons toutes les deux eu nos périodes de domination, mais à chaque fois l'autre a su trouver des solutions pour changer le cours du match. Dans le cinquième jeu, j'ai essayé de rester calme sur les points importants, et de ne pas me disperser. Je crois que c'est ce qui a fait la différence. »
Comme lors de ses précédents matches, Milou van der Heijden a été sérieusement bousculée par Coline Aumard en finale mais a fini par s'en sortir (Crédits photo : Draz Foto)
Remporter un tournoi dans l'hexagone, ce n'était pas une première pour Milou van der Heijden (qui évolue par ailleurs pour l'équipe de Bourges en championnat de France Interclubs depuis trois saisons) : elle s'était imposée à l'open de France junior en 2009, puis à l'international du Val de Marne) Créteil sept ans plus tard. « Une raison particulière ? C'est peut-être grâce au pain français, que j'adore ! Concernant Annecy, l'ambiance était fantastique. Les personnes de l'organisation ont fait le maximum pour que nous soyons dans les conditions optimales, et que nous puissions donner le meilleur de nous-mêmes sur le court. Le public aussi a été génial, c'est rare qu'il soit aussi enthousiaste pour un tournoi de cette catégorie (11 000 $) ! C'était super qu'il y ait autant de monde dans les tribunes pour nous encourager. Bien sûr en finale les gens étaient pour Coline, mais ils m'ont aussi applaudi à chaque fois que j'ai fait un beau coup. Je vais garder un œil sur le calendrier la saison prochaine, et je serais ravie de revenir à Annecy ! »
SA CARRIÈRE EN UN CLIN D'ŒIL
La première passion de la jeune Milou a été la danse, mais il était inévitable qu'elle attrape tôt ou tard le virus du squash : sa famille possède deux clubs et son père a été entraîneur national aux Pays-Bas. Peu après avoir disputé son premier tournoi à l'âge de 12 ans, elle décide de se consacrer uniquement au squash. Elle passe professionnelle après avoir fini le lycée, puis remporte son premier titre 5 000 $ sur le circuit international en 2012 en Australie, à l'âge de 21 ans. Cinq autres suivront entre 2014 et 2017. Milou a représenté son pays dans toutes les catégories d'âge en jeunes – notamment lors de trois championnats du monde junior – et connaît sa première sélection en senior en 2010 : âgée de seulement 19 ans, elle évolue notamment aux côtés de l'ancienne n°1 mondiale et championne du monde Vanessa Atkinson.
Milou van der Heijden a remporté à Annecy le plus grand titre de sa carrière, à 28 ans (Crédit photo : Draz Foto)
De nombreuses autres suivront, et en 2016 elle participe activement à l'obtention de la médaille de bronze de son pays au championnat d'Europe, alors que les Pays-Bas avaient été relégués en Division 2 deux ans plus tôt (en raison de son absence, conjuguée à celle de Natalie Grinham). Détentrice de quatre titres de championne national, van der Heijden a récemment intégré le top 30 mondial, grâce à sa régularité dans les gros tournois (elle a passé le premier tour lors des trois derniers Platinum). « Même si je viens d'atteindre mon meilleur classement, je pense que je peux encore progresser. Je travaille en permanence sur mon déplacement, et il y a d'autres secteurs de mon jeu que je peux améliorer. On ne cesse jamais d'apprendre. » Grâce à sa victoire à Annecy, la plus prestigieuse de sa carrière, elle devrait se rapprocher du top 25.
Source : Site Officiel Milou van der Heijden
LES ATOUTS DE MILOU
La vie de Milou van der Heijden n'a pas été un long fleuve tranquille à l'Annecy Rose Open. Mais lorsqu'elle a été bousculée (par Farida Mohamed en quarts, Rachael Chadwick en demi puis Coline Aumard en finale), la tête de série n°1 n'a jamais paniquée et a su trouver les solutions. « Jouer intelligemment et savoir trouver la bonne tactique est clairement l'une de mes forces. Ce sont des choses que j'ai développées très tôt : quand j'étais plus jeune, je ne me déplaçais pas très bien et j'étais obligée de jouer juste pour compenser cette faiblesse. Aujourd'hui, j'ai progressé dans mon déplacement, tout en conservant mes qualités d'origine. »
Soutenue par son frère Stef à Annecy, Milou van der Heijden bénéficie également des précieux conseils de l'ancienne numéro 2 mondiale Natalie Grinham (Crédits photo : Draz Foto & Nederlands Squash Dames Team)
Milou van der Heijden a un autre atout dans sa manche, et il s'appelle Natalie Grinham. Après avoir évolué pendant de nombreuses années aux côtés de l'ancienne numéro 2 mondiale en équipe nationale, elle bénéficie désormais de ses conseils en tant qu'entraîneur (mais aussi de ceux de son frère Stef, qui était présent à Annecy). « Quand j'étais en junior, je ne regardais pas beaucoup de matches - probablement parce que SquashTV n'existait pas encore - mais Vanessa Atkinson et Natalie Grinham étaient les deux joueuses que j'admirais. C'est un privilège d'apprendre auprès de Natalie. Je pense que c'est après avoir commencé à travailler avec elle que j'ai le plus progressé, et il n'y a aucun doute qu'elle a une influence très positive sur mon jeu. Elle a été l'une des meilleures joueuses au monde, et a tout connu au cours de sa carrière : pouvoir partager son expérience est une chance incroyable. Pour ne rien gâcher, c'est également une personne géniale ... »
UN NOUVEAU SOUFFLE POUR LE SQUASH NÉERLANDAIS ?
Le squash Néerlandais a connu de très grandes heures dans les années 2000, que ce soit en individuels avec Vanessa Atkinson (championne du monde 2004), Natalie Grinham (finaliste en 2009) et Laurens Jan Anjema (premier joueur dans le top 10), ou dans les compétitions par équipe, avec plusieurs médailles continentales et même un titre historique pour les femmes en 2010 : en demi-finale, Atkinson et ses camarades avaient infligé leur seule défaite à l'Angleterre en 40 éditions ! Les choses se sont compliquées par la suite, et on ne trouve aujourd'hui plus aucun joueur Néerlandais dans le top 200 mondial. Mais des signes encourageants pointent le bout de leur nez, avec la tenue d'un très gros tournoi dans quelques jours à Eindhoven, et l'émergence de quelques jeunes joueurs, par exemple Fleur Maas (n°9 européenne en junior).
La jeune Fleur Maas (deuxième en partant de la gauche), ici aux côtés de Natalie Grinham, Tessa Ter Sluis et Milou Van der Heijden, est le grand espoir du squash féminin Néerlandais (Crédit photo : Nederlands Squash Dames Team)
« Effectivement, le DPD Open (du 9 au 14 avril, avec une dotation totale de 215 000 $ et la présence de 18 joueurs et joueuses des top 10 mondiaux !) est un grand rendez-vous pour le squash aux Pays-Bas, ça va être un super événement (Milou affrontera la n°22 mondiale Millie Tomlinson au premier tour et la gagnante se retrouvera ensuite face à la n°1 mondiale Raneem El Welily). C'est une très bonne chose que tous ces joueurs de classe mondiale se produisent aux Pays-Bas. Nous avons aussi quelques jeunes prometteurs, dont Fleur. Elle n'a que 17 ans mais est l'une des meilleurs juniors en Europe à l'heure actuelle, et fait également partie de l'équipe nationale senior. Chez les garçons, il y a des -15 ans qui ont eu de très bons résultats (il y a quelques semaines, la finale de l'open de France junior était 100 % orange entre Samuel Gerrits et Rowan Damming). C'est super de les voir progresser, mais de manière générale, nous avons besoin d'avoir encore davantage de bons jeunes aux Pays-Bas. Plus il y en aura, plus l'émulation entre eux sera importante. »
COLINE AUMARD N'A PAS TOUT PERDU
« Coline a perdu cette finale, mais elle a gagné le cœur des gens, » disait Nathalie Chabot, l'une des organisatrices de l'Annecy Rose Open, après la défaite sur le fil de la Française face à Milou van der Heijden. Pensionnaire du club Haut-Savoyard depuis janvier, Coline Aumard a vécu une semaine remplie d'émotions.
Coline Aumard était partagée entre la déception d'être passée à quelques points de sa première victoire dans un tournoi de cette catégorie, et le bonheur d'une semaine « pleine de moments magiques. Quelle joie de jouer dans mon nouveau club, avec tous ces encouragements qui résonnent encore dans ma tête ! Merci à Rémy Mabillon de m'avoir fait confiance : après avoir pas mal galéré pendant ma carrière, son soutien est un véritable soulagement. Mention spéciale à Grégory Gaultier pour son coaching, il m'a aidée à donner le meilleur de moi-même. » Les conseils de l'ancien numéro 1 mondial, à l'origine de sa venue à Annecy, n'ont pas suffi en finale face à Milou van der Heijden. « C'est évidemment une déception, » affirme la numéro 2 française. « Après quelques jours de repos suite au championnat du monde à Chicago, je m'étais entraînée dur pour être prête à temps. Mais malgré la défaite, ça reste un tournoi positif. Même si quelques erreurs tactiques m'ont coûté le titre, j'ai été suffisamment solide mentalement pour tenir mon rang, et j'ai repris confiance en mon physique. » Après un excellent début de saison, (médaille d'argent au championnat d'Europe individuel, puis contribution décisive au bronze mondial des Bleues en Chine), Aumard avait été freinée par quelques pépins. Sa victoire contre Nele Gilis au premier tour du championnat du monde, puis son très beau parcours en Haute-Savoie lui ont redonné confiance pour la suite de la saison.
Que ce soit sur ou hors du court, Coline Aumard a vécu de sacrées émotions lors de cette semaine Annécienne (Crédits photo : Draz Foto)
Si elle joue pour Annecy depuis janvier, Coline Aumard avait emprunté un autre virage un an plus tôt. Après avoir passé une bonne partie de sa carrière au pôle de Créteil, elle est partie s'installer à Nottingham, « avant tout pour rejoindre mon compagnon (NDLR : le joueur professionnel Anglais Adam Auckland, lui aussi tombé amoureux du club suite à sa venue lors de l'open international en 2017). L'adaptation n'a pas été simple au début, mais maintenant je me sens très bien. J'ai la chance de bénéficier d'un staff complet (elle est entraînée par Mark Fuller) et les installations sont incroyables. » Ajouté à cela le soutien de son nouveau club et de Rémy Mabillon, toutes les conditions semblent réunies pour que la Parisienne effectue une belle fin de saison. « Le principal, c'est que je me sens bien physiquement après une période compliquée. On se persuade souvent qu'on a besoin de victoires référence pour avancer, mais je pense plutôt que le plus important est ce qu'on fait tous les jours à l'entraînement. » Tout en étant consciente d'être plus proche du début que de la fin de sa carrière (elle aura 30 ans le 13 juin), Aumard a encore des ambitions personnelles mais le mot partage revient souvent dans son discours. « La communion avec les gens était fantastique cette semaine. On a en France un public incroyable, que l'on n'utilise pas assez à mon sens. » Elle fait référence au meilleur souvenir de sa carrière, la médaille de bronze au championnat du monde fin 2016 à Paris, « qui reste une émotion incomparable. Si je pouvais terminer ma carrière par un autre championnat du monde en France, ça ne me déplairait pas ... »
Pour revivre l'Annecy Rose Open 2019
Les photos (Draz Foto - Nathalie Chabot)
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