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4ème OPEN INTERNATIONAL DE NANTES : ET LA MAGIE OPÉRA ...

Événements 14/09/2018

L'open international de Nantes avait déjà marqué les esprits lors de ses trois premières éditions. Mais avec l'entrée du squash à l'opéra, l'évènement a franchi un nouveau palier cette année.

Joueurs aux anges, public enthousiaste et instances impressionnées : en transcendant la rencontre entre l'art et le sport, les organisateurs auraient-ils trouvé la formule magique ?

Article de Jérôme Elhaïk

Crédits photos : Lauranne Rochais, Florent Brique, Mikphotos.fr

 

UN LIEU UNIQUE

« Les joueurs nous ont répété toute la semaine que ce tournoi était l'un des meilleurs sur le circuit, et qu'ils n'avaient jamais joué dans un endroit aussi incroyable. Mais peut-être qu'ils disent ça à chaque fois … » nous confiait avec humour François Le Jort dimanche soir, alors que le théâtre Graslin se vidait petit à petit après cinq jours d'effervescence. N'en déplaise au directeur de l'open international de Nantes, et pierre angulaire de ce magnifique projet, on ne doute pourtant pas une seconde de leur sincérité. À chaque match, les deux protagonistes - gagnant et perdant - ont exprimé leur joie de pratiquer leur métier dans un tel endroit, et devant un public nombreux et enthousiaste. Il suffit d'écouter James Willstrop : professionnel depuis 18 ans, l'ancien n°1 mondial a connu tout ce que le squash peut offrir de meilleur, des Pyramides de Giza à la Grand Central Station de New York en passant par la terrasse du Peninsula Hotel à Shanghai. Mais il affirme « n'avoir jamais vu quelque chose de ce genre auparavant. Je me suis installé dans la salle afin d'assister au spectacle d'avant-match, c'était véritablement à couper le souffle. Et lors de mes matches, bien sûr que je pensais à gagner, mais il m'est arrivé plusieurs fois de prendre le temps de regarder autour de moi, afin de mesurer la chance que j'avais d'être ici. » Les athlètes sont généralement – et à juste titre – les acteurs principaux d'une manifestation sportive. Mais l'espace d'une parenthèse un peu hors du temps, ils ont accepté avec humilité de partager, voire de laisser le premier rôle au théâtre Graslin. Finalement, c'était peut-être lui le héros de la semaine ... 

Compte-rendu Nantes 2018 Photo 1

Non, cette photo n'est pas un montage. Declan James, Grégoire Marche, et dix-huit autres privilégié(e)s ont eu la chance de disputer des matches sur la scène du théâtre Graslin

DES UNIVERS EN HARMONIE

On l'a déjà évoqué plus haut : l'un des avantages du squash est ce court vitré, qui peut être monté à peu près n'importe où, et donc dans des lieux merveilleux voire insolites. Mais jamais les organisateurs d'un tournoi ne s'étaient aventurés à s'installer dans un lieu autant chargé d'histoire que cette salle d'opéra, édifiée à la fin du XVIIIè siècle et classée monument historique. Pour réussir ce pari, François Le Jort et son équipe avaient préparé une mise en scène adaptée au lieu. Avant chaque match, Anne-Sophie Duprels a interprété l'air de La Wally d’Alfredo Catalani accompagnée du Quatuor Liger, pendant que deux danseurs disputaient une partie imaginaire, passant en revue toute la panoplie des coups et des déplacements des joueurs de squash. « Réunir de cette façon le sport et la musique est très inhabituel, mais c'est une superbe initiative ! » confiait cette cantatrice de renommée internationale. La rencontre entre ces deux mondes est depuis le début le cheval de bataille des organisateurs : en amenant le squash à l'opéra, leur projet a atteint une forme d'aboutissement. 

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Ce 4ème open international de Nantes a été la rencontre du sport et de la musique, avec comme témoin un public au diapason

 

MAKING OF

François Le Jort est revenu sur la genèse du spectacle proposé avant les matches, élément essentiel de l'évènement. « Les répétitions avaient commencé il y a plusieurs mois à La Maison du Squash. Maxime Simon et Étienne Laurent, les deux joueurs que nous avions choisis, ont été coachés par un chorégraphe et on filmait ces séances afin de pouvoir les revisionner. Ils se sont entraînés pendant des heures avec la musique, parfois devant des joueurs loisirs. On s'était dit que si ces derniers arrivaient à deviner la plupart du temps où allait la balle imaginaire, c'est que nous étions au point (rires) ... »

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Pendant cinq jours, Étienne Laurent et Maxime Simon ont accompagné la cantatrice Anne-Sophie Duprels

Le directeur du tournoi n'a pas loupé un seul de ces shows, et a constaté « qu'ils avaient amélioré de petites choses au fur et à mesure. Ils étaient de plus en plus synchro avec la musique, notamment les deux derniers jours. » Une belle expérience pour ces deux joueurs de bon niveau, mais aussi un moyen de progresser. « J'ai dit à Étienne qu'on l'avait sélectionné parce qu'il avait une bonne technique, et que grâce à cet entraînement il allait monter au classement ! »

 

   

UN TRAVAIL D'ÉQUIPE

« Plus qu'une équipe, un équipage, » avait été la formule utilisée l'année dernière pour qualifier le groupe de bénévoles qui fait vivre cet événement. De plus en plus nombreux, ils ont travaillé en harmonie avec les équipes techniques de l'opéra, alors que le noyau dur reste le même depuis le début : Christophe Bouin, Mathieu Fort, Gabriel Boulanger, Natacha Godel, Antoine Garnier et quelques autres. Dont Romain Suire, de plus en plus à l'aise dans son costume de maître de cérémonie. Pendant cinq jours, celui que les commentateurs de SquashTV surnomment « Suisui » a tour à tour amusé la galerie et fait découvrir la discipline aux non initiés. « Je prépare mes interventions avec des fiches détaillées, ce que je ne faisais pas forcément au début, » confie ce courtier en assurances, « mais j'essaie de conserver une part d'improvisation. » Mais « celui qui les emmène derrière lui, » dixit le président de la Fédération Française de Squash Jean-Denis Barbet, c'est François Le Jort, que Suire appelle le « fou génial. » Depuis quatre ans, ce directeur de projets à LVN (Le Voyage à Nantes, organisme de promotion touristique) s'investit corps et âmes pour la réussite de cet événement. « Ça représente 3 heures par jour, 365 jours par an. Et si jamais je ne peux pas travailler sur l'open pendant une journée, je prends du retard. Ça tombe bien, car j'essaie d'enseigner à mon fils l'importance de la régularité ... »

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Derrière François Le Jort (à gauche), il y a toute une équipe de bénévoles qui travaille d'arrache-pied pour la réussite de cet événement

DES FINALES EN APOTHÉOSE

James Willstrop était sans aucun doute la tête de gondole de cette quatrième édition, et il aurait pu en être le vainqueur. « C'est sûr que l'histoire aurait été belle, » confie Le Jort, grand admirateur de l'Anglais. « Mais c'est la loi du sport, et c'est aussi bien comme ça. Notre tournoi a également pour vocation à mettre en avant les jeunes talents, et cette finale en est la parfaite illustration avec la transition entre deux générations. » Tout près de conclure dans les deux derniers jeux, l'ancien numéro 1 mondial a été victime de la ténacité de son jeune compatriote Declan James. « C'est sans doute la plus grande victoire de ma carrière, et un moment très spécial pour moi à plus d'un titre, » disait ce dernier après le match. « James a été l'une de mes idoles de jeunesse, et être sur le court avec lui est un honneur. De plus, jouer dans cet endroit est exceptionnel, et le public m'a donné l'énergie supplémentaire pour aller au bout de moi-même. Depuis quelques temps, j'ai la chance de m'entraîner avec des partenaires de très haut niveau, comme Mohamed El Shorbagy. J'ai passé des paliers sur le plan mental, notamment en apprenant à dépasser la souffrance. Ça se traduit en match, j'arrive à puiser encore plus loin dans mes réserves, ce qui n'était sans doute pas le cas auparavant. » Chez les filles, on avait découvert Sivasangari Subramaniam l'an dernier, et cette fois-ci ce fût le tour de Lucy Turmel. On souhaite à la championne d'Europe junior de marcher sur les traces de la Malaisienne, qui a explosé depuis. La lauréate 2018 est à peine plus âgée qu'elles. Finaliste il y a douze mois, Nele Gilis a tout d'abord pris une éclatante revanche contre Fiona Moverley, avant de venir à bout d'Emily Whitlock à l'issue d'une finale à suspense (empêchant ainsi une razzia Britannique). « Avant le match, j'ai dit à mes proches que j'étais très détendue, tellement je me sens bien ici, » confiait la Belge de 22 ans après avoir décroché – elle aussi - la plus belle victoire de sa carrière. « Je vais me souvenir toute ma vie de cette semaine. Je me suis battue sur chaque point, afin de n'avoir aucun regret et de profiter au maximum de chaque instant. » 

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La semaine Nantaise a eu un fort accent British, mais la Belge Nele Gilis est parvenue à tirer son épingle du jeu

MASOTTI A PRIS LE RELAIS

Declan James n'a pas fait que priver James Willstrop du titre, il a également été le bourreau des Français lors de cette semaine Nantaise. Après avoir battu Sébastien Bonmalais au premier tour, l'Anglais avait stoppé l'incroyable aventure de Grégoire Marche dans la cité des Ducs : lauréat en 2015, 2016 et 2017, le numéro 3 Français y restait sur une série de treize victoires consécutives ! « On n'oublie pas que tu as grandement participé à la notoriété du tournoi, » disait Romain Suire le lendemain alors que Marche était venu saluer le public sur scène. Mais James ne s'était pas arrêté là, mettant également fin au superbe parcours de Baptiste Masotti. Déjà auteur d'une grande performance face au Néo-Zélandais Campbell Grayson (37ème mondial) en 1/8è de finale à La Maison du Squash, le Niortais a enflammé le théâtre Graslin, en sauvant cinq balles de match face à Olli Tuominen avant de s'imposer. « J'ai essayé de jouer point par point, » disait-il après le match. « Quand j'obtiens ce stroke à 10-10, je sais que j'ai gagné ! C'est tout simplement magique de jouer ici : j'ai la chance de disputer un tournoi du circuit dans ma ville (NDLR : l'open international de Niort), mais là on joue dans un opéra quand même, c'est encore un cran au-dessus ! » Même si Masotti n'a rien pu faire le lendemain contre James, cette première demi-finale dans un tournoi de cette catégorie va booster sa confiance, mais pas seulement : il atteindra le meilleur classement de sa carrière le 1er octobre.

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Le public Nantais a vibré pour Baptiste Masotti mais n'a pas oublié le héros des précédentes éditions

PENSER À DEMAIN

L'essence de l'open international de Nantes est de changer de lieu tous les ans, afin de mettre en valeur le patrimoine culturel Nantais, tout en faisant découvrir le squash à différents publics. La même question revient donc à la fin de chaque édition, « Où sera installé le court vitré l'année prochaine ? » Les rumeurs font état du château des ducs de Bretagne, mais Le Jort assure que « rien n'est décidé. » Peut-être veut-il prendre le temps de savourer celle de cette année, et ce pari un peu insensé d'amener le squash à l'opéra. « C'était quelque part une apothéose. En ce qui concerne la suite, j'aimerais comme je l'ai déjà dit avoir davantage de soutien de la part des instances. Je ne veux pas être Don Quichotte (rires). On nous répète en permanence que notre événement est extraordinaire et que nous sommes l'un des tournois étendards de la discipline, cela doit maintenant se concrétiser par des faits. Mais nous avons eu des discussions très fructueuses avec la PSA (Professional Squash Association), les choses avancent dans le bon sens. Ils sont en train de restructurer leur circuit afin de lui donner davantage de visibilité, et un tournoi comme le notre s'inscrit totalement dans ce cadre. » La ligue professionnelle et son PDG Alex Gough, qui depuis deux ans envoient les équipes de leur chaîne SquashTV à Nantes plutôt qu'en Chine (où la dotation est pourtant plus de cinq fois supérieure), ont « remercié les organisateurs pour leur travail exceptionnel. Leur volonté de réunir le squash et la culture produit l'un des tournois les plus marquants dans le calendrier. »

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Les commentateurs vedettes de la chaîne SquashTV Simon Parke et Joey Barrington étaient une nouvelle fois présents à Nantes

HOMMAGE

On a appris la triste nouvelle jeudi matin : Frédérique Le Jort, épouse du directeur de l'open international de Nantes François Le Jort, est décédée mardi des suites d'une longue maladie. Très appréciée au sein de l'association Nantes Squash Sautron, elle avait énormément œuvré pour le succès de l'évènement depuis sa création. « Elle restera dans nos mémoires comme une femme formidable, » confie Romain Suire, au nom du comité d'organisation. « Nous sommes tous aux côtés de François, et de ses enfants, dans ces moments difficiles. » Son président Jean-Denis Barbet et l'ensemble de la Fédération Française de Squash partagent leur tristesse et leur adressent leurs plus sincères condoléances.

 

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